Guide de la tradition

Le Feu de la Tradition

En Provence, dans l’après-midi du 24 décembre on nettoie la cheminée afin que la bûche allumée le soir de Noël inaugure le feu nouveau dans la maison. Ainsi le « Gros Souper » commence le soir même par la bénédiction de la bûche ou « cacho fue ». La tradition veut que le père de la famille conduise par la main le plus jeune des enfants devant le foyer où crépite la grosse bûche taillée dans un arbre fruitier de préférence. Alors, le gamin muni d’un verre de vin fait trois libations sur la bûche en prononçant les paroles suivantes, en provençal :

« Diou nous fagué la graci de véïre l’an que ven, se sian pas mai que seiguen pas men ». (Dieu nous fasse la grâce de voir l’année prochaine, si nous ne sommes pas plus, que nous ne soyons pas moins).
Ainsi commencent, en Provence, les fêtes calendales.

La Table Calendale

Attention ! La table du Gros Souper ne doit pas être dressée comme celle d’un repas ordinaire. Tradition oblige…. D’abord, le soir du 24 décembre, on mange sur trois nappes afin d’honorer la Sainte-Trinité. Trois chandelles éclaireront la table qui sera ornée soit de houx ou encore de fusain à boules rouges. Le couvert sera dressé avec soins et, en bout de table, il sera ajouté une assiette garnie d’une tranche de pain. Cette place restera libre; ce sera, selon la tradition, la place du pauvre offerte à un inconnu venu frapper à votre porte.

A ne pas oublier : le blé de la Sainte-Barbe qui, semée le 4 décembre dans une petite assiette, doit être présent sur la table du Gros Souper.

Le Gros Souper

Le Gros Souper, nul ne l’ignore, doit être maigre.

Que les gourmands se consolent, ce repas de la tradition est plus que consistant. La famille passe à table à 21 heures afin de pouvoir être présente à la Messe de Minuit.
Le menu peut comporter :

  • Le cardon qui a été introduit en France en 1536 par Rabelais. Ce légume, dont on consomme les côtes que l’on fait bouillir, s’accommode à la sauce blanche avec un filet de citron; ou encore avec une sauce piquante à base de tomate. nombreux sont ceux qui le consomment avec les anchois.
  • Le céleri, accommodé comme le cardon, est également très apprécié.
  • Les artichauts « violets » également présentés comme le cardon ou consommés crus avec une sauve poivrade.
  • La Morue tient une place de choix dans la cuisine provençale. Les recettes ne manquent pas pour préparer ce poisson venu du froid! Sans parler son utilisation dans l’aïoli familial, la recette la plus connue reste la morue en « reito ».
    • La voici :
    • Dessaler la morue pendant douze heures au moins, la sécher dans un torchon et la faire frire à la poêle.
    • La laisser mijoter soit dans une sauce au vin rouge et aux câpres; soit dans une sauce faite de tomates concassées, relevée d’une pointe d’ail.
  • Les poissons, de la Méditerranée, de préférence, sont présentés au Gros Souper. Mais en Provence, l’anguille de l’étang de Berre a les faveurs du public. Frites simplement ou en « reito ».

Un détail : Frédéric Mistral vante le goût du « muge aux olives » sans malheureusement donner la recette.

Les vins. Ils sont nombreux et d’une grande qualité. Blanc, rouge ou rosé… Faites votre choix !

Les Treize Desserts

Dans le grand livre de la tradition Provençale figurent, faisant suite au Gros Souper, les treize desserts que l’on a soigneusement présentés sur un meuble décoré de branches de houx. Voici les principaux :

  • La pompe. C’est une sorte de fougasse à base de fine fleur de farine, d’huile d’olive, d’eau de fleur d’oranger et de sucre. Se consomme accompagnée d’un vin cuit de Provence.
  • Le nougat noir et blanc. Il doit être fait de miel et d’amandes, exactement comme celui qui est fabriqué, depuis 1864, par la Confiserie Fouque de Signes (Var).
  • Les « quatre mendiants » (« lei pachichoi » en provençal). Il s’agit des fruits secs que l’on associait en raison de leur couleur aux robes des frères des ordres mendiants: les noix et les noisettes étaient assimilées aux augustins, les figues sèches aux franciscains, les amandes aux carmes, les raisins secs aux dominicains.
  • Les dattes. Jean Ricard, homme de tradition, raconte que « durant la fuite en Egypte, la Sainte vierge se trouva un jour en présence d’un dattier et, devant la beauté des fruits qu’il portait, laissa échapper de ses lèvres un ‘ô’ admiratif. Le fruit du désert recueillit pieusement cette exclamation sous forme d’un minuscule ‘o’ qui depuis est gravé sur son noyau » !
  • Les autres desserts. Les mandarines, les oranges, les raisins frais, les poires, les pommes enfin, la bûche de Noël…

Faites le compte ! Les treize desserts (et plus) y sont …

La Crèche

Trois dates à retenir :

  • C’est à Rome au XIIIe siècle qu’a pris naissance cette forme de l’iconographie religieuse.
  • Au XVIe siècle, la crèche devient une manifestation culturelle.
  • Enfin c’est à Naples au XVIIIe siècle que naissent les statuettes-mannequins.

 

Pour rester dans le respect de la tradition, vous ne devez pas encombrer votre crèche du maire, du Père Noël ou encore du bohémien. Pour rendre hommage à ceux que le poète Elzéard Rougier appelait les « petits saints laïques », votre crèche se satisfera :

  • Des personnages : L’enfant Jésus, la Sainte Vierge, Saint Joseph, les trois Rois Mages, les pages et l’ange Boufaréou.
  • Des santons : Les bergers, le ravi, le meunier, le rémouleur, le tambourinaïre, le pécheur, la poissonnière, l’aveugle et son fils, les valets, la fileuse, le chasseur, le bûcheron, margaride…
  • Des animaux : L’âne, le boeuf, les moutons, les chèvres, les coqs, les pigeons, les poules, les canards et le chameaux qui accompagnent les Rois Mages.

Retenez ces noms : Lagnel, Louche, Batellier furent les premiers artisans santonniers à Marseille. Aujourd’hui, vous trouverez en Provence, les meilleurs santonniers du monde.